Pour les traiteurs, la période des fêtes de fin d’année est synonyme de boom d’activité. La pandémie de Covid-19 a bousculé les habitudes des consommateurs et perturbé l’activité de catering au Grand-Duché. Ecorama Luxembourg a pris la température auprès des professionnels du secteur, qui malgré un contexte difficile, ont sorti leur épingle du jeu. Tous demandent une prolongation des aides de l’État.

« Début décembre, c’était l’hécatombe. On était bien partis, tout a été annulé en une semaine », résume Tom Oberweis, patron de la maison éponyme et président de la Chambre des métiers. Une fois de plus, la pandémie de Covid-19 a perturbé le déroulement « normal » de la vie. Car, d’habitude, au mois de décembre, les entreprises organisent leurs fêtes de fin d’année. Ce qui signifie pour les traiteurs des commandes, des livraisons et des prestations à assurer auprès de leurs clients. Dans le contexte actuel, les entreprises ne préfèrent pas prendre de risques et reportent leurs événements. C’est ce qu’a observé Luc Meyer, de la Boucherie-Salaisons Meyer. Selon lui, la cascade d’annulations a commencé lorsque les Pays-Bas ont instauré un couvre-feu, que la Belgique a décrété la fermeture de ses restaurants à 23h et que le nombre de contaminations a flambé à cause du variant Omicron. « La peur s’est très vite installée en conséquence, les patrons ont préféré annuler leurs soirées ». Pourtant, les budgets alloués à ces événement semblaient plus conséquents mais la peur de créer un cluster au sein de l’entreprise a pris le dessus.

Rick Hotschnig, directeur de la firme familiale « De Schnékert Traiteur » dresse le même constat que ses confrères sur la partie « traiteur professionnel ». Il a observé un changement dans le comportement des clients. Certains lui demandent aujourd’hui à quelle date ils peuvent annuler leur commande sans avoir à payer de frais. Du jamais vu ! « C’est triste, dit-il, on voit que notre métier n’a plus d’importance dans l’événementiel ». Cependant, il reste persuadé que « ça reviendra ». « ça va pendre du temps » avant que l’activité ne revienne à la normale.

Véronique Behin, directrice de la communication chez Steffen Traiteur nous a assuré que certains clients ont maintenu leurs événements en décembre et que d’autres les ont transformé en formule digitale. « Nous nous sommes adaptés sur des formules livraison pour les accompagner et nous les remercions ».

Si certaines sociétés n’ont pas organisé de fêtes, elles ont tout de même pensé à offrir un cadeau à leurs salariés. Tom Oberweis a vu les ventes de sa division chocolaterie s’envoler (+ 20 à 25% par rapport à 2020). « Il faut s’adapter à chaque situation, on a des solutions », pointe-t-il. Les corbeilles ont rencontré un franc succès. « On en a beaucoup vendu », assure Luc Meyer. Idem chez « De Schnékert Traiteur » qui a dû en livrer 800 à l’un de ses clients.

La cuisine n’est pas qu’un meuble

Du côté des particuliers, la tendance est nettement meilleure. Les professionnels interrogés par nos soins disent avoir mieux travaillé. Selon Rick Hotschnig, « les gens se sont fait plaisir à la maison ». Les ventes effectuées aux différents comptoirs de la marque ont connu « une petite hausse » (entre 5 à 10%). Pour Christian Kaempff de la maison Kaempff-Kohler, « cela a super bien marché. On a observé une hausse du nombre d’invité dans les foyers. Il y a plus de grandes fêtes familiales. Pour la Saint-Sylvestre en revanche, on n’a pas aussi bien travaillé ». Le panier d’achat se situait au même niveau qu’en 2020 mais était « beaucoup plus élevé qu’avant » (la pandémie). « On a remarqué une différence de comportement des clients entre Noël et Nouvel An ». Certains étaient plus tendus tandis que d’autres en ont profité pour se faire plaisir. « Les gens s’offrent de meilleures bouteilles de vin ». Ils veulent profiter de la vie, en somme.

Une période chamboulée est l’occasion de mettre au point de nouvelles formules. Sur ce point, Patrick Niessen, directeur général de la Boucherie-Traiteur Niessen évoque la livraison à domicile. En mars 2020, lors du premier confinement, « on a commencé avec 10 box. Aujourd’hui, on en est à 150 par jour ». En décembre 2020, le Statec avait affirmé dans l’une de ses études que 25% des internautes avaient commandé des repas à emporter ou à livrer à domicile, « la moitié d’entre eux plus souvent que d’habitude ». Luc Meyer dit proposer à ses clients des repas faciles à préparer. « On leur donne de la facilité, beaucoup d’entre eux (qui n’avaient pas l’habitude de cuisiner) croyaient que c’était un meuble », lance-t-il. Les habitudes ont changé. « C’est plus spontané », assure Rick Hotschnig. Il nous cite l’exemple d’un client qui passe une commande pour un petit événement comptant 10 personnes… pour le jour-même !

Pas de faillites grâce aux aides de l’État

Lorsqu’on interroge les traiteurs sur le chiffre d’affaire global de décembre 2021 par rapport à celui de décembre 2020, il a progressé. Cependant, Christian Kaempff dit en avoir perdu à cause des personnes qui ont manifesté contre les mesures sanitaires en vigueur dans le pays.

Tous s’accordent à dire qu’une prolongation des aides de l’État est nécessaire. « Le gouvernement va les prolonger, il n’a pas le choix », souffle Luc Meyer. Paul Thyes, membre du Conseil d’administration de la Luxembourg Event Association (LEA) qui compte près de 100 entreprises membres, affirme avoir été écouté par le ministre des Classes Moyennes Lex Delles. « Sans les aides de relance et de coûts non-couverts, il y aurait beaucoup de faillites dans le secteur. On n’en a pas constaté », grâce à ce coup de pouce et au chômage partiel qui permet de continuer à payer les salariés. « On reste optimiste, on voit la fin du tunnel, il est juste prolongé », souligne-t-il.

Et pour 2022 ? L’optimisme n’est pas de mise. L’année a débuté sans les traditionnelles réceptions du nouvel an et on ne sait même pas si les communions auront lieu ou encore si de nouvelles restrictions feront leur apparition dans le courant de l’année. « Les entreprises du secteur n’ont pas de visibilité, on ne sait pas quand on pourra refaire de petites fêtes », fait remarquer Tom Oberweis. Christian Kaempff ne voit « aucune reprise ». Patrick Niessen et Rick Hotschnig pensent, de leur côté, que les mois qui viennent seront aussi mauvais que 2021. Chez Steffen Traiteur, Véronique Behin soutient que dans les semaines à venir, «nous devrions être très réactifs aux demandes des clients et tout particulièrement aux changements de dernière minute. Nous adaptons nos offres quitte à modifier nos dressages, nos produits, notre façon de préparer nos événements. Réactivité, flexibilité et ouverture d’esprit sont les maitres mots de cette période si bousculée ».

En cette période particulière, les traiteurs font preuve de résilience en s’adaptant et proposant de nouveaux produits aux clients. (Photo : pexels)