L’or est nécessaire en complément, voire en remplacement des actions, selon un spécialiste d’Ethenea.

Ces deux dernières années, l’or a été l’une des rares classes d’actifs à enregistrer de très bonnes performances. Il ne génère aucun flux de trésorerie et n’offre aucun avantage mesurable. Son stockage comporte même des coûts (donc des flux de trésorerie négatifs).

S’il est considéré comme une monnaie, une matière première, une classe d’actifs ou un bijou/bien de consommation, il n’existe actuellement aucun modèle permettant d’établir de manière théorique sa valeur intrinsèque, selon Michael Blümke, Senior Portfolio Manager chez Ethenea.

Cet aspect est l’une des principales critiques de ses opposants et constitue effectivement un inconvénient. Toutefois, tant que sa fonction de valeur-refuge ne sera pas contestée, l’or a forcément une valeur. « L’avantage de l’or par rapport à la monnaie fiduciaire, comme moyen d’échange et valeur-refuge alternative, réside tout simplement dans la limite du stock disponible. Contrairement à la monnaie classique, l’or ne peut pas être imprimé », pointe-t-il.

Au cours des dernières années, l’offre a été relativement stable et les fluctuations relatives de la demande des investisseurs et des banques centrales sont devenues de plus en plus marquées. Étant donné qu’une modification importante de l’offre est improbable, celle-ci étant conditionnée par les capacités réellement disponibles des mines d’or, il faut s’attendre à « des déséquilibres durables entre l’offre et la demande, en particulier du côté de la demande, et plus précisément de celle des investisseurs », prévient le spécialiste.

Pour lui, la dépendance entre le prix de l’or et le niveau des taux réels et pour les raisons suivantes : quand les intervenants de marché sont assez nombreux pour reconnaître à l’or ses caractéristiques de valeur-refuge et sa fonction de moyen d’échange, dans des conditions de libre-échange et détention, l’or peut être considéré comme une alternative valable à la monnaie-papier.

En clair, le pouvoir d’achat de la monnaie dépend du niveau des taux nominaux après déduction de l’inflation, autrement dit des taux réels. « Dans la mesure où cette relation ne vaut pas pour le « pouvoir d’achat » de l’or, le prix de ce dernier (mesuré en monnaie-papier) doit être inversement proportionnel aux taux réels ». La transposition de ce rapport théorique revient donc à l’ensemble des investisseurs, qui déterminent le prix de l’or en pesant continuellement l’attrait relatif entre la monnaie et l’or au travers de leurs échanges commerciaux.

Des taux réels en baisse

Pour répondre à la question de l’évolution future du prix de l’or, il est donc important de prêter attention à la tendance des taux réels, affirme Michael Blümke. « Nous savons qu’en principe, la monnaie-papier est contrôlée par des banques centrales indépendantes, contre la promesse de garantir une relative stabilité des prix ».

La plupart des États sont confrontés à un déficit chronique de leurs finances publiques. Entre temps, les plans budgétaires déployés pour lutter contre la crise de la Covid-19 représentent une nouvelle surenchère dans une spirale qui porte le volume mondial des emprunts d’État à un niveau impossible à tenir sans taux nominaux historiquement faibles et sans la monétisation des dettes publiques (achat d’emprunts d’État par les banques centrales).

Les banques centrales ayant déclaré que les taux d’intérêt resteraient faibles pendant une période prolongée et sachant qu’il est presque certain que l’expansion rapide de la masse monétaire par le biais de la monétisation des dettes publiques aura des conséquences négatives sur l’inflation, il faut encore s’attendre à des taux réels en baisse au cours des prochaines années. Ce qui devrait clarifier la trajectoire des prix de l’or.

Une évolution de l’or différente de celle des actions

D’après le Senior Portfolio Manager de chez Ethenea, « il est plus difficile de se prononcer en ce qui concerne le niveau absolu des prix ». D’un côté, durant le dernier rallye de l’or, les prix ont accusé des corrections de 25 % ou plus. De l’autre côté, même après une longue période de prix record, le cours de l’or a encore réussi à doubler, voire presque tripler.

Michael Blümke pense qu’une exposition à l’or calibrée en fonction de la tolérance au risque doit faire partie intégrante de l’allocation d’actifs, « dans le cadre d’une opinion précise à l’égard des taux réels ». Le constat selon lequel une corrélation élevée pouvait s’observer récemment entre les actions et le prix de l’or, nuisant ainsi à l’effet de diversification recherché, n’est pas dépourvu de sens à court terme mais n’a plus de pertinence dans une perspective plus éloignée.

L’évolution de l’or se dissociera de celle des actions notamment dans le scénario d’une forte poussée d’inflation (impossible à prévoir). Même chose en cas de chute des cours des actions causée par un autre facteur qu’un mouvement des taux.

il n’existe actuellement aucun modèle permettant d’établir de manière théorique la valeur intrinsèque de l’or, selon Michael Blümke, Senior Portfolio Manager chez Ethenea.(Photo : pexels)