La présentation des résultats de l’exercice 2022 du cabinet d’audit EY était l’occasion d’aborder le sujet de la séparation des activités d’audit et de conseil. Pour l’instant au Luxembourg, la décision n’a pas été prise.
Début septembre 2022, le géant de l’audit et du conseil EY officialisait sa volonté de séparer ses deux branches d’activité phare. La société soumet au vote de ses associés ce projet de séparation en deux entités qui recouvriraient d’un côté les activités d’audit et de l’autre de conseil. Le vote en question qui implique les 13.000 associés au niveau mondial, devrait se dérouler jusqu’à la fin de cette année pour une validation avant la fin 2023.
Comme l’indique un paragraphe du communiqué de presse consacré aux résultats de 2022 de la branche luxembourgeoise, « au regard des avancées de l’analyse stratégique des activités de la firme, les dirigeants d’EY sur le plan mondial, régional et national sont arrivés à la conclusion qu’il était souhaitable de pousser plus en avant un projet de séparation en deux organisations distinctes ». Une telle évolution des structures créera « davantage d’opportunités pour les collaborateurs d’EY, renforcera le mode opératoire de nos activités d’audit, augmentera le choix des clients en termes de prestataires et sera créateur de valeur pour l’ensemble des parties prenantes ». Cette séparation permettra aussi » un accès accru au capital à réinvestir dans le personnel et dans les services et solutions fournis aux clients, en se concentrant sur les questions qui impactent nos parties prenantes ».

Interrogé par nos soins sur le sujet lors d’un « walking lunch » organisé ce mardi, un partner du cabinet d’audit nous a assuré qu' »au Luxembourg, nous n’avons pas pris de décision ». Il faudra attendre le début de l’année 2023 et connaître le résultat des votes des associés dans les autres pays. L’un de ses collègues assure que si le projet ne se fait pas, « ce sera ‘business as usual' ». En revanche, dans l’hypothèse où il deviendrait réalité, « ce sera une libération d’énergie au niveau du consulting, cela étendra le champ des possibilités ». Et par conséquent, il y aurait des embauches. Pour un autre, cette séparation permettra de développer encore plus la partie « Managed Services ».
Une procédure qui n’est pas anodine
« Les Pays-Bas et le Royaume-Uni semblent favorables à la séparation des activités », nous souffle un associé. « C’est une tendance de fonds. D’ailleurs, le régulateur aux États-Unis milite pour le split », ajoute-t-il.
Selon un article du site challenges.fr, depuis plusieurs années, les « Big 4 » (Deloitte, KPMG, PwC et EY) font l’objet d’un examen réglementaire car « ils craignent que leurs services de conseil ne compromettent leur capacité à mener des examens indépendants ». Dans l’hypothèse où la scission des activités est actée par les partners, elle serait « le plus grand grand bouleversement du secteur depuis l’effondrement en 2002 d’Arthur Andersen, l’auditeur embourbé dans le scandale Enron et dont la chute a réduit les « Big Five » à « Big Four ».
Cette procédure n’est pas anodine puisque KPMG est poursuivi depuis peu dans une procédure à 1,3 milliards de livre « pour manquements à ses obligations dans la faillite du groupe de construction Carillion, l’une des plus importantes jamais connues au Royaume-Uni », informe le texte. « Le secteur de l’audit outre Manche est dans le collimateur du gouvernement, pointé pour n’avoir pas vu venir des faillites emblématiques ces dernières années: outre Carillion, celles de la chaîne de magasins BHS en 2016 (PwC) et du voyagiste Thomas Cook en 2019 (EY) », dit-il encore.
Côté résultats, 2022 a plutôt été un bon cru au Grand-Duché avec un chiffre d’affaire en hausse de 12,3% au 30 juin qui s’élevait à 325 millions d’euros contre 286 millions en 2021. Les branches ont toutes enregistré de fortes croissances : +11,1% pour l’audit, +9% pour la fiscalité, +44,2% pour la stratégie et transactions. Au niveau mondial, EY annonce des revenus de 45,4 milliards de dollars, soit une augmentation de 16,4%. « Cela marque l’une des années les plus prospères de l’histoire de l’organisation, avec la plus forte croissance observée depuis près de deux décennies ». Autre fait important, 530 personnes ont rejoint EY Luxembourg depuis le 1er juillet 2022. « Plus de 850 nouveaux salariés auront été embauchés avant la fin du mois de juin 2023 pour renforcer le cabinet dans ses ambitions de croissance », souligne le communiqué.