D’après Volker Schmidt, gérant de portefeuille Senior chez Ethenea, les obligations ne revêtent aucun intérêt pour les investisseurs non professionnels. Voici pourquoi.

Il y a quelques temps, la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé la fin des ses achats d’obligations. Cette décision ne fera pas diminuer l’offre d’obligations sur les marchés. Il faudra trouver de nouveaux acheteurs. Qui pourrait être intéressé par ce type de produit? Les particuliers? Pas vraiment. Volker Schmidt, gérant de portefeuille Senior chez Ethenea pense qu’un investisseur non-professionnel ne peut « pas faire grand chose avec des obligations à rendement négatif ».

La raison est simple : l’investissement minimum habituel de 100.000 euros les rend aussi « peu intéressantes », selon le spécialiste. Petit détail et non des moindres, les particuliers n’ont pas forcément une telle somme à mettre dans un produit. Les professionnels, en revanche, ont continué à acheter des obligations en euros pour plusieurs raisons. « Certains n’ont pas d’autres choix car leur statut le leur impose », souffle-t-il. C’est le cas des compagnies d’assurance, des fonds de pension, des fonds obligataires purs ou encore des fonds multi-actifs à dominante obligataire. D’autres utilisent les obligations comme un moyen de moyen de diversifier ses investissements ou comme source de performance.

Les obligations en euros ont connu deux vagues de forte hausse des prix en 2019 et en mars 2020. Les portefeuilles d’obligations diversifiées ont enregistré une perte d’un peu moins de 3% et d’environ 8% au début de l’année 2022. Dans ce contexte, Volker Schmidt estime que les perspectives de rendement pour les investisseurs particuliers est « limité ». Il appuie son propos en citant le cas des obligations souveraines allemandes. Leur rendement a augmenté après l’annonce de la BCE à propos du ralentissement du rythme d’achat des obligations et sur le fait qu’elle n’excluait plus des hausses d’intérêt cette année. Avec un rendement de 0,9%, soit un coupon de 0% et un prix d’achat de 92%, il est certain que ce n’est pas un produit attractif.

De l’argent à chercher sur les comptes des particuliers

Alors, doit-on se tourner vers les obligations d’entreprise? Là encore, ce n’est pas gagné. Elles présentent un inconvénient de taille pour les particuliers : un investissement minimum de 100 000 euros. En moyenne, les obligations ayant une notation de qualité et une échéance de cinq ans offrent un rendement de 1,5%. Le taux est bas mais il faut accepter des pertes en qualité pour obtenir des rendements plus élevés.

Dans l’ensemble, les rendements des investissements en obligations libellées en euros resteront « peu intéressantes » pour les particuliers. D’après le gérant de portefeuille, une opportunité éventuelle réside dans la réduction progressive des achats par la banque centrale. « Si les achats d’obligations sont totalement stoppés d’ici l’été, les émetteurs seront plus enclins à chercher de nouveaux acheteurs », dit-il. Une autre option est possible : réintroduire la gestion libre des obligations souveraines allemandes comme celle proposée par l’Agence Fédérales des Finances jusqu’en 2013. Un certain potentiel existe. Au 30 décembre 2020, selon Eurostat, l’institut européen de la statistique, les ménages privés dans l’Union européenne disposaient d’un patrimoine financier de 32 000 milliards d’euros. Sur cette somme, près de 33% se présentent sous la forme d’espèces et de dépôts à court terme. Le chiffre est susceptible d’avoir crû de 5% en 2021. Les émetteurs d’obligations vont « se disputer cet argent et tenter de le retirer des comptes bancaires encore soumis à des intérêts de pénalité. Il est possible que cela augmente la pression sur les banques pour que celles-ci répercutent les taux d’intérêt de la banque centrale qui augmenteront probablement cette année sur leurs clients », avance M.Schmidt.

Le contexte géopolitique actuel marqué par la guerre en Ukraine a aussi une influence sur les investissements. Il y a eu un « exode à court terme » vers les valeurs refuge et les obligations souveraines. L’inflation, accentuée par le conflit se déroulant aux portes de l’Europe, a renforcé la volonté de la BCE de relever les taux d’intérêt et à accélérer le retrait de ses programmes d’achat d’obligations. Ces futures hausses des taux et celles des rendements obligataires dissuaderont les particuliers à investir dans les obligations. Selon le spécialiste d’Ethenea, « nous sommes loin d’une inflation compensée par les rendements obligataires et les rendements réels resteront négatifs ».

La normalisation de la politique monétaire se reflète également au niveau des emprunts. Les banques sont en train de se préparer à la fin de la réduction de l’exigence en termes de fonds propres. Elles renforceront probablement les critères standards pour les prêts, y compris les hypothécaires. Il deviendra donc plus difficile d’emprunter de l’argent pour acheter son bien immobilier. Ces mesures combinées à celles des banques centrales ne feraient que consolider davantage la faiblesse des rendements des obligations.