C’est bientôt l’heure. Le Black Friday approche à grands pas. Ce que nous considérions autrefois comme une frénésie de réductions typiquement américaine est aujourd’hui bien ancré chez nous. Des remises spectaculaires attirent des foules vers la Meir à Anvers, la Veldstraat à Gand, la rue Neuve à Bruxelles, ainsi que vers les boutiques en ligne. Nous voulons tous profiter de bonnes affaires, mais prenons-nous suffisamment le temps de réfléchir aux conséquences de notre comportement ?
Par Pascale Hendrickx, Managing Director de Milgro Belgique
Bien sûr, il n’y a aucun mal à attendre une réduction importante pour acheter quelque chose dont vous avez réellement besoin. Mais trop souvent, les promotions du Black Friday — et les machines marketing qui les accompagnent — nous poussent à acheter impulsivement, à commander plus vite et surtout à choisir moins consciemment.
Qui parmi nous pense à la hausse du trafic logistique, à la montagne d’emballages supplémentaires qui finira dans les déchets ou à l’augmentation des retours qu’un jour comme le Black Friday entraîne ? Selon une étude récente menée par Milgro aux Pays-Bas, 75 % des consommateurs seraient plus attentifs dans leurs choix si le renvoi des articles était payant. Bien que les frais de retour soient déjà un peu plus courants en Belgique, un volume considérable de produits continue d’être renvoyé autour du Black Friday. Chaque retour a une empreinte écologique : transport, matériaux d’emballage, articles endommagés qui deviennent invendables. Nombre de ces produits finissent encore tout simplement à l’incinérateur alors qu’ils sont toujours utilisables. C’est du gâchis — un gâchis de ressources, d’énergie et de CO₂ investis dans leur fabrication.
La même étude de Milgro révèle que 80 % des Néerlandais souhaitent davantage de transparence quant au devenir des produits retournés. Il est probable que de nombreux Belges achèteraient plus intelligemment s’ils savaient ce que deviennent leurs articles renvoyés une fois hors de leur vue. Actuellement, ils disparaissent tout simplement du radar, créant ainsi l’illusion que nous pouvons consommer sans conséquences, que tout ce que nous achetons peut circuler sans coût et que notre comportement d’achat peut se caler sur des calendriers commerciaux.
C’est précisément ce qui rend le Black Friday problématique. Le modèle de consommation qu’il incarne va à l’encontre de ce qui est nécessaire pour assurer un avenir vivable. Le Black Friday appelle toujours plus : plus de produits, plus de transport, plus de gaspillage. Et cela dans un contexte où les ressources s’amenuisent, l’énergie devient plus chère et où la montagne de déchets ne cesse de croître.
Heureusement, nous observons aussi des contre-mouvements en Belgique. De plus en plus d’entrepreneurs misent sur le « Local Friday » ou le « Green Friday » et privilégient la qualité plutôt que la quantité, le service plutôt que la rapidité. Malheureusement, de telles initiatives ne font pas encore le poids face au battage médiatique que génère le Black Friday année après année. Le slogan « Achetez belge » se perd dans le vacarme des campagnes marketing de retailers et de boutiques en ligne internationales. Pour l’instant, l’avantage économique à court terme l’emporte encore trop souvent sur les choix durables à long terme.
Cette tribune est-elle donc un appel à abolir le Black Friday ? Pas du tout. Même si plus de la moitié des Néerlandais interrogés (54 %) ne trouveraient pas cela problématique, le Black Friday peut, selon moi, continuer d’exister. Nous pouvons même en faire quelque chose de positif. C’est une opportunité pour les retailers d’aider les consommateurs à faire les bons choix. En communiquant de manière transparente sur les flux de retour, en positionnant la seconde main et le reconditionné comme de véritables alternatives, ou encore en proposant des produits conçus pour durer et être réparés. Et si nous utilisions les énormes efforts marketing autour du Black Friday pour mettre en avant la véritable valeur, l’usage et la responsabilité ? Nous pourrions alors profiter de bonnes affaires sans avoir à payer, plus tard, le prix élevé d’une consommation irréfléchie.
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